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Michel Duru : « la culture durable, sociale et équitable doit profiter des innovations technologiques"

La biologie est désormais au coeur des recherches agronomiques. L’interaction entre les milieux naturels s’impose comme la voie d’avenir d’une agriculture parvenue aujourd’hui aux limites du modèle productiviste. Pour des rendements encore augmentés.

Rediversification des exploitations et des territoires agricoles, allongement des rotations des cultures, bio contrôle des ravageurs, agroforesterie, synergie entre espèces, symbioses végétales sont autant de pistes qu’explore aujourd’hui la recherche agronomique. L’enjeu étant de pouvoir garantir la sécurité alimentaire de neuf milliards d’humains à l’horizon 2050 quand les surfaces agricoles se réduisent, de garantir aussi leur santé en préservant l’environnement. Michel Duru, directeur de recherche à l’Inra en charge de l’agroécologie et Guillaume Bécart, professeur à l’université Toulouse 3 Paul Sabatier, ont ainsi débattu de la thématique de l’agriculture durable lors de la dernière conférence des Grandes Ouvertures organisée par l’académie des Sciences, des Inscriptions et des Belles-Lettres de Toulouse et l’université Paul Sabatier à l’hôtel d’Assézat à Toulouse.

Selon eux, si la technologie est incontournable pour le développement de la filière agricole, elle ne peut faire désormais l’économie de la réintroduction et de l’optimisation de techniques agraires utilisées avant le productivisme et de la prise en compte de la richesse des milieux naturels. « L’agroécologie est une voie complémentaire », explique Michel Duru. Car elle recèle d’intérêts pour contenir le réchauffement climatique et réduire la pollution des sols et de l’eau tout en augmentant les rendements. Michel Duru a précisé en effet que depuis deux décennies les rendements agricoles ne progressent plus tandis que l’usage des produits phytosanitaires est resté intense. Il a rappelé que les évolutions choisies depuis les années 50 affectent l’environnement, mais aussi la santé humaine, via la consommation.

Changer de paradigme, une question d’éducation

De fait, pour lui « la culture durable, propre, sociale et équitable » est à reconsidérer par toute la filière et doit profiter des innovations technologiques pour performer la substitution des intrants : « l’utilisation des technologies est essentielle pour gérer les flux de matières et d’énergie, pour limiter leur utilisation et leur impact environnemental ». Il prône toutefois un changement de paradigme, une révolution culturelle qui commencerait par une approche différente du sol : « il faut le voir comme un milieu vivant dont la biodiversité et la bonne santé lui permette de résister au stress ».
Ce que confirme Guillaume Bécart : « Un sol naturel c’est un milieu physique et biologique. Dans l’équivalent d’un dé à coudre de terre il y a jusqu’à deux milliards de bactéries, un million de cellules fongiques et 5000 cellules d’algues notamment ». Que la recherche entend aujourd’hui exploiter pour développer la nutrition des plantes.

Champignons et bactéries entrent dans la catégorie des engrais depuis que leur rôle est mieux connu : ils fixent l’azote naturel au niveau racinaire. « Leur utilisation dans les cultures constitue une technologie de rupture qui permet d’augmenter les rendements », assure Guillaume Bécart. Reste à imposer ce modèle plus vertueux. Les chercheurs ne sont pas convaincus que la contrainte soit la meilleure voie. Pour Michel Duru, il faut « parler et expliquer ». « Ce n’est même pas une question d’argent, ça relève juste de l’éducation ! » conclut-il.
Nathalie Malaterre

Sur la photo : une parcelle de soja. Pour Michel Duru, la synergie entre espèces permet de réduire les besoins en intrants, la recherche a ainsi prouvé que la culture de soja doit être combinée à celle de tournesol : les deux plantes sont complémentaires. Photo DR - ToulÉco.

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Source : https://www.touleco-green.fr/Michel-Duru-la-culture-durable-sociale-et-equitable-doit,16308