Margot Schaad, Fanny Guillot, Loric Ferreri, Arthur Braun, Merlin Leppens et Quentin Hunt forment une bande pas comme les autres. La trentaine, une solide formation en agronomie à l’institut Agro Montpellier pour cinq d’entre eux et un objectif commun : s’installer en collectif dans une ferme et produire, en agriculture biologique, des légumes et des céréales, cultiver un verger, développer un poulailler mobile, faire du pain et de la bière à partir des cultures de l’exploitation. Et proposer leurs produits en circuit court, au juste prix, pour le développement d’une consommation durable. « Le projet de Ferme des croquants a été mûri pendant cinq ans », raconte Loric, l’un des artisans du groupe.
Expériences complémentaires
Cinq ans de discussion pour concevoir un concept complet, basé sur une agriculture durable, où chaque thématique est réfléchie, testée puis validée par le groupe. « Une fois le projet écrit, nous sommes allés sur le terrain pour acquérir expériences et compétences », poursuit Loric, qui, avec Merlin, se forment durant trois ans au maraîchage agroécologique dans le Var. Margot part elle en Alsace et travaille en production et vente avec les Jardins de Cocagne, réseau de fermes en agriculture biologique favorisant l’insertion socio-professionnelle. Fanny s’investit au sein de la Fédération pastorale de l’Ariège et travaille le dimanche dans un fournil. Quentin, formé en menuiserie, se spécialise dans les techniques de brassage. Arthur, quant à lui, étudie l’économie d’une exploitation bio en conditions réelles, en Vendée.
Déploiement du projet en Ariège
En 2021, les compagnons commencent à chercher une exploitation à reprendre, entre les Alpes et les Pyrénées. C’est en Ariège, à la Bastide de Besplas, qu’ils sont séduits par les 32 hectares d’une exploitation qu’ils rachètent avec l’association Terre de liens. Deux ans plus tard, l’activité maraîchère est lancée. Une quarantaine de variétés de légumes cultivés sur sol vivant, avec un verger qui viendra s’intégrer sur la surface. Puis développement, d’ici fin 2024, d’un poulailler mobile, les gallinacés étant particulièrement utiles au désherbage, à la lutte contre les ravageurs et à l’amendement. Fanny gère l’activité céréales et la fabrication du pain, suppléée par Loric, alors que Quentin développe l’activité de brasserie.
Chaque membre du collectif est référent d’une activité et suppléant d’une autre. La production trouve déjà ses circuits de distribution, en vente directe à la ferme, sur les marchés, via des magasins de producteurs à Foix et à Toulouse. La construction d’un modèle économique n’est pas simple, mais est l’aboutissement d’un travail concerté, dans le respect des compétences et des envies de chacun.
Une nouvelle façon de cultiver autant qu’un style de vie
« On arrive sur une page vierge. Il faut définir l’équilibre d’un système pour six personnes », observe Merlin. Le choix du nom, "les Croquants", n’est pas un hasard. Un adjectif teinté de douceur, mais aussi un nom qui s’inspire du mouvement paysan en révolte et qui convient bien au collectif. Militant, actif et réfléchi, pour le bien-être de chacun comme celui de l’environnement. Ainsi, un bassin est-il en cours de création sur la ferme, un design hydrologique basé sur la collecte de l’eau de ruissellement des parcelles ; des « kilomètres de haies » sont en cours de constitution, pour assurer la biodiversité du lieu et créer un microclimat.
La Ferme des croquants n’est pas une île au milieu des terres agricoles, c’est aussi un travail de coordination et de partage avec les voisins, ainsi qu’une réflexion sur le travail en agriculture : ici, 45 heures par semaine, pas plus ; on s’organise pour les soirées et les congés. Le groupe discute beaucoup, accompagné par l’Association tarnaise pour la culture de groupe. « C’est comme un couple, mais à six », sourit l’un d’entre eux. « Accueillants, bienveillants, bosseurs, organisés », écrit une cliente sur la page Facebook de l’exploitation à propos de ce collectif inspirant. La rencontre vaut le détour.
Valérie Ravinet
Sur les photos :
– Le groupe, avec, de gauche à droite : Arthur Braun, Fanny Guillot, Loric Ferreri, Merlin Leppens, Margot Schaad et Quentin Hunt. // Margot Schaad, légumes à pleines mains // Arthur Braun, travail sous serre. // Quentin Hunt, triage des céréales - Crédits : Raphaël Kann.