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Comment les microplastiques se retrouvent dans l’air « pur » des Pyrénées

Pour la première fois, des chercheurs du CNRS Toulouse et Grenoble ont compris comment les microplastiques sont présents dans la neige des Pyrénées ou l’air du Pic du midi. En établissant le cycle de vie des plastiques à travers le globe, ils dressent un constat alarmant : sans récupération des déchets présents sur les continents, la pollution causée par ces particules se poursuivra pendant des millénaires.

Chercheur spécialisé dans la chimie atmosphérique des polluants au Pic du midi depuis une dizaine d’années, Jeroen Sonke a démontré, avec une équipe internationale de scientifiques, que la pureté de l’air des Pyrénées n’était hélas plus une réalité. « En 2019, nous avions cherché à voir s’ils étaient présents dans la haute atmosphère et on avait constaté qu’il y en avait également dans la neige et la pluie », indique le chercheur du laboratoire Géosciences environnement Toulouse (GET).

Fort de ce constat, Jeroen Sonke et son collègue Gael Le Roux, chercheur au sein du Laboratoire écologie fonctionnelle et environnement (LEFE), se sont lancés dans un projet plus ambitieux. Objectif : comprendre l’importance du cycle atmosphérique dans les grands cycles du plastique, des gros objets aux microplastiques. Grâce à un travail de synthèse de la littérature des vingt dernières années, et avec l’aide de l’Institut des géosciences de l’environnement (IGE) de Grenoble, ils ont mesuré les quantités de plastiques présentes dans les différents écosystèmes. « On en retrouve énormément dans l’océan profond, environ 300 fois plus qu’en surface », alerte Jeroen Sonke. « Mais cela ne représente que 3 % des plastiques que l’on peut trouver sur les continents. »

« Même si on arrête la pollution plastique en 2025, cela peut se poursuivre pendant des millénaires »

Les équipes de recherche se sont ensuite intéressées aux flux d’émissions et de dépôts atmosphériques, aux taux de sédimentation océanique et à la vitesse de dégradation des plastiques pour établir le premier modèle mathématique compréhensif du cycle de vie des plastiques. Elles se sont notamment appuyées sur des relevés effectués dans douze sites à travers le monde. « La dispersion des plastiques est essentiellement due aux rivières, qui les conduisent dans les océans. On a également compris qu’il y avait des émissions terrestres et marines vers l’atmosphère. Les plastiques des continents, que l’on retrouve par exemple dans les sols agricoles qui utilisent les boues des stations d’épuration, sont transportés par les vents ou les cours d’eau pour finir dans les océans. »

Cependant, leur parcours ne s’arrête pas là. En raison des temps de sédimentation longs, ils peuvent être ramenés vers les continents par les brises marines par exemple, d’où leur présence dans les Pyrénées, mais aussi aux deux pôles ou dans l’Himalaya. « C’est un cercle vicieux. Et plus les particules sont petites, plus elles sont dangereuses pour l’ensemble de l’écosystème », insiste Jeroen Sonke. « Même si on arrête la pollution plastique en 2025, cela peut se poursuivre pendant des millénaires, en raison des énormes quantités de plastiques qui se fragmentent sur les continents. » Alors que de nombreuses actions sont actuellement menées pour récupérer les plastiques à la surface des océans, « des démarches inutiles », le chercheur insiste : « Il faut récupérer tout ce qu’il y a sur terre avant que ça ne finisse dans les océans. » Pessimiste Jeroen Sonke ? Pas totalement, puisqu’il croit notamment aux avancées de la microbiologie pour la dégradation des plastiques.
Paul Périé

Sur les photos : Grâce à la plateforme pyrénéenne des observations atmosphériques du Pic du midi, des microplastiques ont été détectés dans l’air, à cette altitude. // Échantillonneur de dépôts atmosphériques opéré par Gaël Le Roux - Crédits : Jeroen Sonke.

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Source : https://www.touleco-green.fr/Comment-les-microplastiques-se-retrouvent-dans-l-air-pur-des,36704