Le rêve de Railcoop, société coopérative d’intérêt collectif qui veut relancer des lignes de trains voyageurs et de fret, a viré au cauchemar. Lundi 29 avril, le tribunal de commerce de Cahors a prononcé la liquidation judiciaire de cette coopérative aux 14.838 sociétaires, née à Figeac dans le Lot en 2019. Son projet phare consistait à rouvrir pour les voyageurs une ligne ferroviaire transversale entre Bordeaux et Lyon avec une multitude d’arrêts (Périgueux, Montluçon, Roanne…), fermée depuis 2014 faute de rentabilité. Les trains devaient effectuer 626 kilomètres en un peu moins de huit heures, sept jours sur sept. Initialement prévu en 2022, le lancement de cette liaison, à raison d’un aller-retour par jour, avait été repoussé à l’été 2024.
À vrai dire, cette faillite annoncée ne constitue pas une surprise. Au bord de la cessation de paiement, Railcoop avait déjà lancé en juin un appel urgent à ses sociétaires pour lever 500.000 euros avant le 30 septembre, afin de régler les salaires et payer les fournisseurs. Elle n’avait finalement réuni que 383.500 euros. Placée en redressement judiciaire en octobre 2023, Railcoop avait six mois supplémentaires pour trouver des capitaux afin de garantir la poursuite de son activité. Car la coopérative avait cumulé presque 5 millions d’euros de pertes depuis sa création en 2019 et elle n’était pas en mesure de payer 880.000 euros de frais de garage demandés par la société ACCM, spécialiste de la restauration de matériels ferroviaires, qui hébergeait les rames.
Pouvoirs publics et SNCF
« Railcoop avait un projet vertueux, dont la philosophie est d’associer les citoyens, les usagers et les pouvoirs publics. Or, il n’y avait pas de volonté politique ni de soutien pour développer une ligne de train intérieure. C’est bien dommage et regrettable », dénonce Rémi Roux, président de l’Union régionale des scop et cofondateur d’Éthiquable. D’ailleurs, l’entreprise gersoise était sociétaire de Railcoop. À ce titre, elle avait soutenu financièrement le projet. Mais pas seulement. Elle avait utilisé la ligne de transport de marchandise entre Figeac et Saint-Jory, en banlieue toulousaine, pour transporter des commandes. Mais cette ligne était à l’arrêt depuis début 2023.
Dans un contexte européen d’ouverture à la concurrence du rail, la société voulait rouvrir de vieilles lignes non exploitées mais elle s’est toutefois heurté rapidement à la difficulté de travailler avec la SNCF, notamment sur le marché du train de voyageurs. « Rentrer sur le marché ferroviaire est un sacré challenge », avait estimé à l’été 2023 le patron de Railcool, Nicolas Debaisieux, sur la chaîne BFM Business. « Les redevances sont plus élevées en France que dans le reste de l’Europe et représentent un quart de nos charges d’exploitation. »
Audrey Sommazi