Il souffle des vents contraires sur l’éolien dans le pays du Moulin à six ailes, le Lauragais. Le 28 mars 2013, le tribunal administratif de Toulouse annulait la zone de développement d’éolien - ZDE -, portée par la communauté de communes du Lauragais sud, ColaurSud. Mais ce qui pouvait sembler sonner comme une victoire pour les associations de riverains n’est qu’un coup d’épée dans l’eau. La loi Brottes, votée au mois de mars, permet dorénavant à toute entreprise ou particulier, muni d’un permis de construire, d’installer une éolienne en dehors de toute ZDE.
Les sept éoliennes portées par l’entreprise Eneria vont donc trouver sur les terres du Lauragais un espace à occuper. Une perspective qui réjouit le maire de Calmont, Christian Portet : « Le tribunal s’est prononcé sur la forme, mais le permis de construire n’est pas attaqué. Les associations n’ont pas trouvé utile de se prononcer contre ce permis de construire, or il reste valide jusqu’en 2015. »
« Avoir gagné aujourd’hui ne sert à rien »
Le tribunal administratif de Toulouse a souligné par sa décision le manque d’échanges avec les citoyens. Pour l’association de défense des côteaux du Lauragais, et sa représentante Sandra Mazingant, la population n’a pas été suffisamment concertée : « Tout ceci a été très flou pour nous, nous n’avons pas été interpellés sur la création des zones par exemple. Et toutes nos demandes auprès de la mairie de Calmont restent lettre morte. Or cette installation provoque des inquiétudes. Ce sont des piliers de 120 mètres de haut. Nous n’avons pas d’hauteur équivalente dans nos campagnes. Ce serait comme avoir la Tour Montparnasse ! »
Les incidences sur la valeur immobilière, sur la santé, sur le paysage, la faune et la flore, inquiètent les riverains qui avaient posé un recours devant le tribunal administratif de Toulouse en 2011. « Mais avoir gagné aujourd’hui ne sert à rien, puisque qu’une ZDE n’est plus nécessaire pour bénéficier d’un tarif de rachat de l’électricité préférentiel », poursuit Sandra Mazingant.
Une énergie intermittente et non stockable
Les interrogations de fond demeurent, notamment sur les bénéfices en termes d’énergie produite. Une production intermittente, et non stockable, placent aux yeux des associations les éoliennes en bout de chaîne des énergies renouvelables : « La production est très faible, ces éoliennes ne fonctionnent que 25% du temps. Et si il y a trop de vent, elles ne fonctionnent pas. Elles sont arrêtées la nuit à cause des nuisances sonores. » Rétives à voir s’installer à 500 mètres de leurs habitations des géants dont les pales mesurent jusqu’à 90 mètres, les associations plaident donc pour d’autres choix d’énergies renouvelables : « Nous sommes tout à fait pour la création du parc photovoltaïque sur Calmont, ce sont des solutions que nous préconisons. Comme celle des bâtiments à énergie positive, ou la biomasse. Il faut miser sur d’autres technologies que l’éolien qui ne peut être une solution à long terme. »
Une exigence gouvernementale
Mais pour Christian Portet, l’installation des éoliennes, comme le champ photovoltaïque de 27 hectares aujourd’hui en phase finale, répondent aux exigences gouvernementales en matière de transition énergétique. « Il faut bien trouver des solutions, et s’appuyer sur des potentialités naturelles : que les zones boisées utilisent le bois, ici nous avons du vent et du soleil, profitons de cela. »
Situé à 3 kilomètres à vol d’oiseau des éoliennes, et protégé par les vallons du Lauragais, Calmont ne se retrouvera pas à proximité visuelle et sonore des éoliennes. Mais ce n’est pas un régime de faveur pour le maire de Calmont, qui estime « délirantes les nuisances sonores que l’on prête aux éoliennes. Et des études d’impact ont été réalisées par des bureaux spécialisés. Il y a un accord unanime des élus sur ce projet, comme sur celui du photovoltaïque. Nous avons la volonté d’apporter notre contribution politique à cette transition énergétique. »
De son côté, la société Eneria, concessionnaire exclusif de Caterpillar, qui a démarché la communauté de communes en 2002, compte une dizaine d’années avant de rentabiliser le site qui lui coûte « entre 15 et 20 millions d’euros ; la rentabilité devrait être de l’ordre de 7%. » Le tarif de rachat par EDF est de 82 euros le megawatt-heure. Les éoliennes devraient pouvoir produire 14 mégawatts. La communauté de communes ColaurSud récupérera, elle, la contribution économique territoriale qui a remplacé la taxe professionnelle. Elle sera calculée en fonction de la puissance installée.
Virginie Mailles Viard
Crédit photo : Hélène Ressayres - ToulÉco
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