Didier Gardinal, la crainte d’un envol des prix de l’énergie dont les entreprises seront les victimes est-elle étayée ?
D’une manière générale, nous faisons face à une diminution des ressources et à une augmentation de la demande. Le coût de l’énergie a déjà augmenté et cela continuera.
De plus, en France, nous bénéficiions de tarifs pour l’énergie, particulièrement pour l’électricité, parmi les plus bas d’Europe. L’ouverture du marché de l’énergie à la concurrence, en conformité avec le droit Européen, implique la disparition des tarifs règlementés par l’état, et laisse présager un alignement sur les tarifs de nos voisins, et par conséquent une augmentation consécutive.
Des exemples viennent étayer cette crainte. Depuis 2003, les gros consommateurs d’énergie ont la possibilité de souscrire à des contrats aux tarifs de marché. Ceux-là ont vu le coût de l’énergie augmenter de 260% entre 2003 et 2008 !
D’autres exemples d’ouverture des marchés à la concurrence, en France et en Europe, comme la téléphonie ou le ferroviaire, se sont soldés par le même résultat. Les contrats sont attrayants au début, mais les tarifs augmentent très rapidement par la suite, selon la loi du marché.
Les CCI sont-elles en mesure, sont-elles autorisées à opérer ou à soutenir ce qui se met en place dans le public qui crée des groupement d’achat afin de tirer les prix vers le bas ? Est-ce souhaitable ?
Nous avons pour objectif d’accompagner les entreprises dans toute démarche leur permettant de se développer et nous les informerons de l’existence et du fonctionnement de ce type de groupement d’achat. Il existe des structures privées qui proposent ce type de service et nous venons en complément, pas en concurrence.
La dérégulation et l’augmentation prévisible de la facture énergétique poussent à la responsabilisation des entreprises, à la maitrise des dépenses : quels outils la CCI propose-t-elle aux entrepreneurs pour y parvenir ?
Nous offrons aux entreprises de Midi-Pyrénées la possibilité de bénéficier d’une visite énergie, réalisée par un conseiller CCI, comprenant l’analyse des factures et des contrats, une évaluation des postes de consommations et l’identification des sources d’économies possibles. En complément, et avec l’appui de financements ADEME et Conseil Régional, certaines entreprises pourront profiter de diagnostics énergie réalisés par des bureaux d’études, d’un accompagnement à la maitrise d’ouvrage et de bilans carbone ou d’un accompagnement à la mise en place d’un système de management de l’énergie, financés à 50%. Des ateliers collectifs d’échanges inter-entreprises et des formations d’experts énergie vont également être proposés.
De plus, une réunion d’information sur la fin des tarifs règlementés se tiendra le 6 novembre prochain à Blagnac, dans les locaux de la CCI Midi-Pyrénées, et permettra aux entreprises d’anticiper la négociation avec les différents opérateurs afin de bénéficier des meilleurs tarifs.
Va-t-on voir se développer des solutions allant vers une autonomie énergétique, l’auto-production, qui serait une sorte de retour aux sources de l’industrialisation ?
Un groupe de travail sur l’autoproduction et l’autoconsommation lancé fin 2013, auquel notre partenaire, le Pôle DERBI, a participé, a fourni des recommandations dans le but de définir un futur cadre règlementaire. Il a soulevé la question de la gestion du réseau et de la limitation des « pics » et permis d’identifier certains secteurs où l’autoconsommation est intéressante (tertiaire, entrepôts frigorifiques…).
Dans notre région, sur la zone de Borderouge, est actuellement menée une expérience de production d’énergie renouvelable (photovoltaïque et éolienne) qui peut soit être autoconsommée, soit stockée grâce à des batteries lithium-ion. La gestion est assurée par un smart-grid, qui assure l’adéquation entre la production et la consommation.
D’autres projets menés en Aquitaine, Languedoc-Roussillon ou Poitou-Charentes tendent à prouver qu’une décentralisation des productions couplée à une gestion par smart-grids peut effectivement être une solution d’avenir visant à développer les filières éoliennes et photovoltaïques.
Propos recueillis par Virginie Mailles Viard