Quelle est la problématique des Indiens Kogis ?
C’est une problématique de territoire. Ces Indiens sont les descendants de la civilisation des Tayronas, massacrés par les conquistadores. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 12.000. Au fur et à mesure de la colonisation, ils ont été repoussés au nord de la Colombie sur la Sierra Nevada de Santa Marta, la plus haute montagne en bordure de mer, qui culmine à 6.000 mètres d’altitude, à moins de 48km des côtes. Tout le projet de l’association Tchendukua depuis 15 ans, à la demande des Indiens Kogis, c’est de racheter des terres au pied de cette montagne pour réinstaller des familles et avoir accès à des terres cultivables. En quinze ans, nous avons racheté un peu plus de 1.500 hectares de terre et investi 1,5 million d’euros sur place. Et nous nous sommes rendu compte que la plupart de ces terres où l’on a retrouvé des ruines enfouies d’anciennes constructions et des stèles, sont celles de leurs ancêtres.
Quels sont vos espoirs pour cette nouvelle tournée ?
L’objectif que l’on s’est fixé avec les Kogis est de racheter une vallée entière, soit 1.000 hectares, au cours des trois prochaines années, ce qui nécessite de mobiliser 1 million d’euros, soit deux tiers de la somme qu’on a investie ces quinze dernières années. C’est pourquoi l’association doit se faire connaître et sensibiliser tous les citoyens à la cause des Kogis. Ces Indiens sont porteurs de valeurs et de connaissances qui nous concernent tous, dans le domaine du « comment mieux vivre ensemble » notamment. Ils ne travaillent, ne réfléchissent et ne décident que collectivement. La notion d’individu n’existe quasiment pas pour eux. L’idée dans ces soirées, est d’amener le public, par un effet miroir, à réfléchir à deux problématiques que nous posent les Kogis : que faites-vous de la nature et quel est le sens de vos actions ? Des questions essentielles que peuvent se poser aussi les entreprises et plus encore celles qui sont sensibles à la démarche du développement durable
En quoi la cause des Kogis peut-elle les interpeller ?
Des entreprises qui voudraient faire de la compensation carbone peuvent le faire avec nous. Nous pouvons toucher toutes les entreprises qui se sentent concernées par la préservation de la biodiversité et d’un patrimoine ancestral, comme le groupe Clarins qui est l’un de nos principaux financeurs. Elles peuvent aussi se sentir impactées par les valeurs des Indiens Kogis sur la prise de décision collective et envisager un mode de management plus participatif, plus coopératif avec le monde qui les entourent, leurs salariés, leurs clients, leurs fournisseurs ou leurs actionnaires. Comment passer d’une culture de la compétition à une culture de la coopération, sachant que la compétition nous amène tous dans le mur, sur le plan environnemental mais aussi sociétal ? Cela nous amène à une vision globale de l’entreprise, à repenser certains de nos modèles économiques, à réfléchir en termes d’intelligence collective. C’est le thème que nous avons choisi pour la conférence-débat d’Entiore.
Recueilli par J.D.
Pratique
Dans le cadre de la tournée française « Regards croisés sur ce monde qui vient » organisée par l’association Tchendukua au profit des Kogis, une délégation d’Indiens sera à Toulouse :
– le 15 octobre à 19h30 à la Halle aux Grains pour une soirée grand public sur le thème de la santé avec Thierry Janssen et Jean-Louis Crouan, docteurs en médecine, Eric Julien, fondateur de l’association Tchendukua, la compagnie de théâtre toulousaine Cœur et Jardin et Art Mengo.
– le 16 octobre à Entiore, à Quint-Fonsegrives, pour une soirée placée sous l’égide de la CCI de Toulouse et qui rassemblera plusieurs dirigeants locaux autour d’une conférence sur le thème de l’intelligence collective.
Renseignements et réservations en ligne : www.tchendukua.com
Sur les photos : Jean-Pierre Chometon, président de l’association Tchendukua / La communauté des Indiens Kogis de Colombie compte environ 12.000 membres. Crédits : DR.