Des cantines dépourvues de légumerie, des fours adaptés aux barquettes mais trop petits pour accueillir des poulets, des producteurs dont les produits ne correspondent pas aux calibrages imposés par la restauration industrielle. Production locale et restauration collective semblent vivre sur des planètes différentes. Pour qu’elles se rencontrent et travaillent de concert, il faut de la persévérance et une foi chevillée au corps.
C’est ainsi qu’est née la plate-forme Terroir Ariège Pyrénées, « plate-forme pour approvisionnement local de la restauration collective en Ariège ». Sur son berceau, se sont penchés agriculteurs, élus de collectivités, cuisiniers de cantines. Du haut de ses quatre années d’existence, la société coopérative d’intérêt collectif a fait face à une mission que d’aucuns qualifiaient de quasi-impossible, raconte Clémence Poupin, conseillère circuits courts à la Chambre d’Agriculture de l’Ariège et animatrice de la Plate-forme Terroirs Ariège Pyrénées : « La culture du local, de la vente directe, est profondément ancrée dans notre comportement. Les producteurs, les artisans, préfèrent rencontrer directement leurs clients sur les marchés, ou lors des ventes à la ferme, que de passer par un intermédiaire. Mais ils ont compris que pour répondre aux exigences de la restauration collective, il fallait des moyens techniques et une plate-forme logistique. » Laquelle centralise l’offre des produits à transmettre aux cuisiniers, les commandes pour les producteurs, assure les factures, réceptionne et distribue les denrées.
Agriculteurs et restauration collectives : deux mondes qui s’ignorent ?
La restauration collective s’est tournée pour des raisons de sécurité sanitaire, de simplicité, vers les poids lourds de la restauration industrielle. Les cantines d’aujourd’hui ont adapté leur fonctionnement à leur fournisseur qui apporte du prêt-à-chauffer, prêt-à-manger. Dans cet univers formaté, et aseptisé, comment faire rentrer des produits bruts et différents ?« Par la volonté des élus, répond Clémence Poupin. Ils veulent préserver ce lien avec les producteurs et ils se préoccupent de l’intérêt alimentaire des enfants. Et cette SCIC a été créée par des agriculteurs impliqués et volontaires. Ils ont donc fait l’effort de conditionner leurs produits, d’acquérir les outils de transformation, afin que l’on puisse répondre aux appels d’offre. » Le combat pourrait être inégal entre les leaders de la restauration et les producteurs, mais ces derniers se sont positionnés sur le bio, et les produits locaux et de saison : soit 340 références, dont des produits labellisés IGP ou AOC. « Nous proposons autre chose, continue l’animatrice. Les cuisiniers se remettent à éplucher et à faire des fonds de sauce, ils étoffent les équipes de travail, et réapprennent la saisonnalité des produits. »
La société de transports Apaméenne Setak, sillonne le département, transportant les 65 tonnes déjà commercialisées en 2014. La SCIC Territoire Ariège Pyrénées a réalisé un chiffre d’affaire de 211 000 euros en 2014. Elle compte se développer auprès des maisons de retraite, et des centres de loisir. Et continuer à satisfaire les papilles de nombreux petits élèves scolarisés dans les quinze établissements clients de la plate-forme ariégeoise.
Virginie Mailles Viard