Une chose au moins était sûre : la pisciculture d’Antignac avait trouvé en 2012 son successeur naturel, en la personne d’Emilien Nouals, âgé de 25 ans. Quand il décide de reprendre cette entreprise qui appartient à sa famille depuis deux générations, la pisciculture compte dix-neuf bassins d’élevage, un lac, et trois bassins de pêche. L’entreprise fournit alors en poissons une grande partie de la Haute-Garonne. Située sur la commune d’Antignac (31), proche de Bagnère-de-Luchon, elle distribue son cheptel en circuit court. Les 20 tonnes de poissons sont destinées à la vente sur place, aux grandes surfaces, mais également au secteur touristique, via les associations de pêche qui proposent des concours de pêche aux familles. Emilien Nouals s’affaire et anticipe le départ à la retraite de son père. « J’ai préparé les dossiers pour bénéficier des aides à la reprise, racheté un cheptel de poissons, remis l’installation aux normes. J’ai également passé le Brevet Professionnel d’Exploitation Agricole avec l’option Responsable d’Exploitation Aquacole Maritime-continentale. »

Mais en juin 2013, alors que la transmission d’entreprise est effective, des inondations centennales bouleversent durablement l’avenir du site. L’Apic déborde, se déverse dans les bassins, les grillages de protection se couchent, les poissons s’échappent et laissent place aux troncs d’arbres qui eux s’entassent. Le parking est retourné par le torrent, le bâtiment agricole et les habitations inondés. La pisciculture d’Antignac dort désormais sous 80 centimètres d’eau. Il faudra à Emilien Nouals beaucoup de volonté et de courage pour s’attaquer à la réhabilitation du lieu. La ville de Toulouse lui envoie son équipe de handball, les Fenix. Cinquante joueurs qui nettoient une partie des bassins remplis de boue et de graviers arrachés des routes, dégagent les troncs d’arbres. Mais toute cette solidarité n’a pas permis le réveil du site. « La pisciculture est au point mort. J’ai besoin de pelles mécaniques pour nettoyer des bassins où la boue s’est transformée en terre, où la végétation a poussé. Ces bassins sont en bord de rivière, c’est instable, je ne peux pas le faire seul, il faut faire appel à des professionnels. »
Les terres agricoles ne sont pas assurables
Le coût total estimé à plus de 20 000 euros, est pris en charge à 70% par la Direction Départementale du Territoire. Reste 8000 euros à trouver pour réhabiliter les terres, une démarche que ne couvrent pas les assurances, « puisque les terres agricoles ne sont pas assurables ». Le jeune chef d’entreprise a donc déposé son projet sur la plate-forme de financement participatif Ulule. Un choix judicieux, puisque " Des viviers pour des poissons à Antignac" a récolté 3000 euros en quelques jours. Un montant qui permettra le curage de certains bassins. En fonction du montant de l’aide, les donateurs pourront bénéficier d’une demi-journée de pêche en famille, d’une canne à pêche, ou encore déguster sur place les poissons pêchés.
« Mais il manque encore 4500 euros, un montant qui supporterait le curage du canal d’arrivée, du canal de sortie et de la quasi-totalité des bassins. » Emilien Nouals compte faire revivre cette pisciculture qui existe depuis 60 ans, ouvrir une Amap (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne), faire de la vente directe, accueillir les écoles et centres de loisirs, travailler avec les collectivités et les restaurants... Pour que le vivier de poissons d’Antignac devienne « un lien d’échange sur la pisciculture, et une entreprise oeuvrant pour le territoire. »
Virginie Mailles Viard
Sur les photos : Emilien Nouals, pisciculteur - Les Fenix venus en nombre aider à nettoyer le site.