« 80% du bois utilisé en Occitanie pourrait venir de la région »

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L’Occitanie est désormais la deuxième région forestière française avec 2,5 millions de m3 de bois récoltés par an. A l’occasion de l’Assemblée générale de l’interprofession Midi-Pyrénées Bois, le 27 juin, Gilles Barreau, Vice-président, revient sur les défis de la filière.

Gilles Barreau, vous êtes Vice-Président de l’interprofession Midi-Pyrénées Bois et expert forestier au sein du bureau d’étude If Consultants. Quels sont les défis pour la filière bois régionale ?
Gilles Barreau : Il faut que nous parvenions à relocaliser une filière d’approvisionnement sur la majorité des produits et cela passe par une amélioration de la rentabilité des scieries locales. Actuellement on est entre 30% et 50% d’approvisionnement en bois local alors que 80% des bois utilisés pourraient venir de la région. Aujourd’hui les professionnels de l’usage du bois travaillent en flux tendu avec des négociants qui font des commandes groupés. Le scieur local ne fait pas le poids. Il faut que les scieries se réorganisent pour aller vers la spécialisation - il y plusieurs familles de bois et qu’ils évoluent dans leurs méthodes et modes de commercialisation.

Par exemple ?
Il y a une initiative de regroupement qui préfigure à mes yeux ce qui pourrait être développé. C’est l’entreprise les Bois du Midi. Elle résulte d’un groupement d’industriels de la région qui mettent à disposition un ensemble de produits issus de leur propre transformation. Les produits sont en circuit court, les transports optimisés et un turn over des stock important et rapide permet de revendiquer des produits locaux économiquement avantageux. Cette entreprise est l’intermédiaire moderne qu’il faut développer pour concurrencer les négociants. C’est dans ce sens que l’interprofession veut faire évoluer les choses avec l’aide de la Région.

Il faut donc trouver des financements. La région vient d’annoncer la mise en place d’un contrat de filière bois au premier semestre 2017. Est-ce durable d’être toujours subventionné ?
Nous avons clairement besoin de cet accompagnement mais nous réfléchissons aussi à conquérir notre autonomie. Le contexte actuel de la valorisation des systèmes écosystémiques, notamment dans le cadre de la loi biodiversité, ouvre des pistes. Aujourd’hui, le bois est une industrie lourde : des millions sont investis pour une marge très faible. Or la filière forestière rend des services au-delà de la production de bois. Elle épure l’eau, fixe du carbone, accueille de la biodiversité et est un écrin de vie sociale. Ces services rendus par la forêt sont évalués à 900 euros par hectare et par an [1]. quand la seule activité bois en génère 10%. Quand une scierie fournit de quoi faire une poutre, c’est du carbone fixé ou « évité ». Il faut que nous modernisions notre système de financement pour l’avenir. Nous sommes sur plusieurs modèles possibles. Il y a la compensation carbone volontaire pour que des entreprises qui ont des impacts carbone dans la région puisse cibler la protection de massifs forestiers. Nous venons de mettre en place une méthode expérimentée auprès d’une banque pour comptabiliser dans leur bilan le carbone forestier ou plutôt « les » carbones : le carbone évité, le carbone en stock - les arbres sur pied- et le carbone d’accroissement, - ce que gagne chaque année la forêt.

Vous souhaitez donc impliquer les industriels ?
Oui mais il va falloir du temps pour construire ces nouvelles relations et cela va être complexe. Il faut avoir beaucoup d’humilité. Ce sujet de la forêt en tant que filière bois, support de services écosystémiques avec une composante carbone, est d’une très grande complexité dans laquelle la simplification est un ennemi mortel.
Propos recueillis par Aurélie de Varax

Photo DR

Chiffres clés
 2,6 millions d’hectares
 10.000 entreprsies
 32.000 emplois
 Plus de 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires
 430.000 propriétaires forestiers privés.
 2,5 millions de m3 de bois récoltés par an
 152 scieries produisant 428.000 m de sciage par an.

Notes

[1Rapport Centre d’analyse stratégique - Bernard Chevassus-au-Louis - 2009

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Source : https://www.touleco-green.fr/Gilles-Barreau-80-du-bois-utilise-en-Occitanie-pourrait-venir-de,19624