Et si on recyclait les lisiers ? Spécialisée dans la conception de systèmes brevetés d’extraction d’eau par filtration membranaire, la start-up Nereus a mis au point Mobilis, une unité industrielle mobile qui devrait faire le bonheur des producteurs de biogaz et des agriculteurs. « Nous avons changé de paradigme. Nous ne faisons pas de traitement d’un liquide en vue de sa potabilisation. Face à une eau usée, nous cherchons à extraire et valoriser toutes les ressources, » martèle Emmanuel Trouvé.
Ingénieur agronome passé par la Lyonnaise des Eaux, Orelis puis Veolia, ce dernier a créé Nereus en 2013 au Pouget, dans l’Hérault. Selon le dirigeant, beaucoup de projets d’installation d’unités de méthanisation sont freinés aujourd’hui par la recherche de terres et la construction du plan d’épandage, ce dernier étant soumis à une réglementation sévère qui interdit souvent l’épandage des digestats pendant tout l’hiver. Nereus propose une alternative au stockage difficile et couteux des digestats et des lisiers pendant cette période : la valorisation in situ de ces matières liquides. « Notre unité mobile va fragmenter tous types de lisiers et de digestats en valorisant les effluents pollués pour en extraire de la matière sèche qui pourra être utilisée comme combustible solide renouvelable, de l’eau de qualité potable, et de l’engrais. »
Gain de productivité pour le biogaz
Outre la valorisation des digestats et des lisiers, les systèmes d’extraction proposés par Nereus consomment peu d’énergie et permettent un gain de productivité conséquent pour la filière biogaz. « L’unité peut être utilisée toutes l’année et elle peut charger à 110% puisque le procédé permet d’extraire rapidement le surplus d’eau. Au total, cela augmente de 10% à 40% la charge annuelle, » détaille Emmanuel Trouvé.
Lauréate 2015 du Prix coup de pouce de la Région Languedoc Roussillon, Nereus est membre du Pôle Eau et de la pépinière d’entreprises Cœur d’Hérault. Elle bénéficie « d’un environnement académique favorable et de nombreux partenaires industriels dans le domaine des membranes à commencer par leader mondial des membranes céramiques Orélis et l’Institut européen des membranes de Montpellier ». Au niveau académique, la start-up collabore également avec l’Inra de Narbonne et l’Insa Toulouse.
Sécuriser les premières ventes
Le démonstrateur mobile Mobilis tourne actuellement sur différents types d’élevages à l’Est et au Nord de la France ainsi qu’au Benelux et en Allemagne afin d’affiner les différents programmes de l’appareil en fonction des élevages concernés. Côté biogaz, la start-up cible le marché des unités de méthanisation produisant plus d’un mégawatt, soit 400 à 500 unités en Europe et table sur la vente de trois unités industrielles en 2016 ce qui permettrait à l’entreprise de doubler son chiffre d’affaires, actuellement de 500.000 euros.
Face à d’importants besoins en fonds de roulement, l’entreprise qui compte quatre collaborateurs, prévoit également une levée de fonds de 600.000 euros en octobre. De quoi achever sa phase d’amorçage et sécuriser ses premiers contrats. Parallèlement à ce lancement de produit, Nereus poursuit la commercialisation de ses systèmes de recyclage de l’eau, notammant dans le secteur des constructions HQE.
Aurélie de Varax
Sur la photo : Emmanuel Trouvé, fondateur de Nereus devant l’unité industrielle mobile Mobilis. Photos Nereus.