C’est inscrit dans la loi de transition énergétique. la France doit réduire ses consommations d’énergie d’ici 2050 pour atteindre la division par quatre de ses émissions de gaz à effet de serre. Nous sommes actuellement à la moitié de l’objectif avec une réduction annuelle de 1,25% quand il faudrait 2,5%. Chacun peut s’y mettre, - entreprises, collectivités, citoyens -, avec des enjeux très forts sur le bâtiment, les transports mais aussi l’industrie. Des leviers de croissance sont à la clé. En quoi le numérique peut aider les acteurs ? Quelles sont les solutions qui émergent ? A l’occasion de son Café Green ce vendredi 18 décembre, ToulÉco Green et ses partenaires ont réuni quatre invités pour y répondre.
Le numérique au service de la mobilité

Le numérique est au coeur du projet de Coovia. Créée en 2012, la start-up propose une solution de transport multimodal via une application qui intègre le covoiturage et les transports en commun en temps réel. « La valeur ajoutée de mon entreprise, c’est de permettre aux gens de partager leur véhicule de façon simple et efficace, en économisant et en gagnant du temps », souligne David Larcher. Pour chaque trajet d’une moyenne de dix kilomètres, c’est un kilogramme de CO2 qui n’est pas émis et trois euros pour le covoitureur. Dans la loi Macron figure l’obligation de l’open data sur le secteur des transports. Coovia entend se différencier des offres concurrentes par l’innovation. « Nous avons développé un algorithme très puissant pour offrir à chaque usager plusieurs solutions multimodales et l’instantanéité », précise David Larcher.
Côté freins, l’entrepreneur a souligné l’importance de sécuriser les données sur la vie privée des usagers, le défi de l’open data qui implique de créer des données uniformes, la réticence des acteurs publics à céder leurs données, notamment sur les horaires en temps réel. Sans oublier le risque de multiplication d’offres concurrentes qui divise le nombre d’abonnés par solution. Coovia dispose déjà de 5000 abonnés sur la plateforme toulousaine et se déploie actuellement auprès d’entreprises et collectivités par le biais d’abonnements, à commencer par ATR et le Sicoval. Selon David Larcher, « côté salariés, cela permet de créer du lien social et de faire des économies. Et pour l’entreprise de créer un réseau collaboratif et d’économiser des parkings. »
L’efficacité énergétique par l’internet des objets

Créée en mai 2014, la start-up Naelbox a développé une solution hardware et software qui utilise l’internet des objets pour la gestion énergétique des bâtiments. Un sujet désormais soumis à des contraintes réglementaires puisque la RT 2012 et la norme Iso 50.001 obligent les acteurs à s’équiper d’un système de management de l’énergie. Des capteurs connectés aux compteurs envoient des informations en temps réel via le réseau bas débit Sigfox. « Nous permettons l’accès aux consommations à bas coût et éventuellement produisons des alertes via un réseau social énergétique sous forme de mail ou via une application dédiée », détaille François Frossard, cofondateur de l’entreprise. La solution est actuellement en pilote au sein des groupes Eiffage, Vinci et La Poste.
« Statistiquement cela permet 10% d’économies sur le volet technique. Ensuite, si on peaufine c’est 15%. Si on ajoute les usages, on peut monter facilement à 20%, » poursuit François Frossard. Côté résultat sur les factures, tout dépend donc de l’implication du management, le frein majeur restant le faible coût actuel de l’énergie. « Si la norme Iso 50.001 oblige les acteurs à s’équiper, c’est leur propre choix avant d’être la réponse à un signal prix mais ils amortiront les chocs énergétiques plus facilement. » Outre le secteur du bâtiment, la start-up ambitionne de se développer également dans la maintenance, par exemple, sur des parcs photovoltaïques où ses box peuvent accompagner efficacement le pilotage de l’effacement ou créer des alertes.
L’autonomie énergétique par le very smart grid

Selon Stéphane Lambert, co-fondateur d’Edison ways, l’avenir est aux bâtiments autonomes en énergie. « On pourrait effacer au moins 10% de la production des centrales nucléaires en effaçant les pointes de courant en fin de journée. Si chaque bâtiment produit et stocke, c’est possible. Pour cela, il faut penser un système énergétique durable et intelligent via une stratégie botom-up. » C’est le défi de la start-up montalbanaise Edison Ways fondée en 2014 et lauréate du concours EDF énergie intelligente 2014. Elle propose une troisième génération de réseaux électrique économes à double titre. Une nouvelle architecture de câbles filaires permet de réduire la masse de métal utilisée de 70% en moyenne. Ensuite, elle repose sur l’optimisation de la distribution des charges électriques depuis le générateur, grâce à des boitiers numériques intelligents qui répartissent les charges au plus près des usages. « Le numérique permet de mesurer de manière dynamique les consommations de chaque charge et la capacité de toutes les sources connectées et de les piloter en incluant la maintenance préventive et prédictive. Notre objectif c’est de passer à de l’énergie autonome », précise Stéphane Lambert.
L’entreprise lance actuellement plusieurs démonstrateurs sur le bâtiment, l’aéronautique et l’automobile. Côté freins, elle se heurte à la réglementation actuelle sur les circuits électriques, c’est pourquoi elle cible les pays émergents où cette solution répond aux enjeux de la raréfaction et des nouveaux besoins énergétiques. « Pour nous développer, nous avons un travail pédagogique à effectuer. Il a commencé auprès des opérateurs, des constructeurs et des gouvernements notamment des pays émergents », conclut Stéphane Lambert.
Le numérique au coeur de la transition énergétique

Selon Laurent Ruel, expert en efficacité énergétique, le numérique est également efficient en énergie sur des pilotages à distance dans différents domaines comme l’agriculture ou encore sur les questions de précarité énergétique. « Une étude du CNRS auprès de mille familles a révélé qu’un suivi en temps réel des consommations avec des alertes permettait 23% d’économies en moyenne sur les factures. » Côté freins, sl le coût de l’énergie ralentit clairement la marche, d’autres obstacles emboitent le pas, à commencer par la difficile prise de conscience comportementale dans les entreprises et l’omniscience de l’opérateur historique EDF qui représente 80% des abonnés.
Mais la nouvelle loi NOME (Nouvelle organisation du marché de l’électricité) qui ouvre le marché à la concurrence à compter de janvier 2016, pourrait changer la donne. « Les solutions numériques vont permettre de mettre de l’énergie en vente à la minute puisqu’elle varie à chaque seconde en fonction de l’offre et de la demande. Pour se différencier, les opérateurs vont utiliser le numérique pour créer des tarifs différenciés en fonction des usages et proposer des opportunités d’effacement. » Tous ces mécanismes, ainsi que le déploiement du stockage de l’énergie, devraient dans les années à venir se mettre au service d’un objectif : consommer moins et mieux en évitant les pics de consommation. « Cela permettra de réduire la taille de l’ensemble des capacités de production en France et de mieux utiliser les réserves », ajoute Laurent Ruel. La transition énergétique passera par l’intelligence numérique.
Aurélie de Varax
Les Cafés Green sont organisés par ToulÉco Green, en partenariat avec l’Agence de l’eau Adour-Garonne, la CCI Midi-Pyrénées, Cler verts, Ecocert et Toner d’Encre.