C’est un véritable coup de massue pour les habitants de la commune de Canals dans le Tarn-et-Garonne. Le tribunal administratif vient d’avaliser la demande de permis déposée par l’entreprise Eiffage : le projet de construction d’une usine d’enrobage et de concassage. Une ICPE, une « installation classée pour l’environnement », contre laquelle se battent depuis 2009 les habitants de Canals et des communes avoisinantes. Le dénouement de ce combat administratif, écologique et citoyen, est désormais entre les mains du préfet du Tarn-et-Garonne, explique l’eurodéputée du Sud-Ouest, Catherine Grèze. « Cette installation se fait dans un rayon de deux kilomètres d’une commune qui compte 560 habitants. J’interviens en tant que députée européenne, sur les conséquences sanitaires d’une usine de bitume sur la santé. Ce n’est pas une lubie écologique. »
Le courrier de la députée adressé cette semaine au préfet du Tarn-et-Garonne fait état « des conséquences et effets secondaires négatifs du passage annoncé des 10 000 camions pour 50 à 85 jours d’activité, sans compter les nuits où l’activité sera aussi intense. » Les inquiétudes de la population des communes de Canals, Bessens, Campsas, Diepentale, Fabas, Grisolles et Fronton, sont accrues par la cohabitation de l’usine avec l’école primaire. « Mais nos arguments n’ont pas été entendus, » témoigne un adhérent de l’association Cadre de vie. « Et Eiffage a des moyens et de bons avocats. Il nous mettent une pression énorme, en termes de paiement de dommages et intérêts, des sommes financières que nous ne pouvons pas assumer. Et l’approche des élections municipales freine les choses. C’est l’adjoint au maire de l’équipe sortante, en charge de l’urbanisme qui a vendu le terrain ! »
Etude de l’Anses : risque sanitaire et exposition au bitume
Le passage répété des camions n’est pas l’unique argument des habitants réfractaires à l’implantation. Les rejets dans l’atmosphère d’une usine fabriquant du bitume ont des effets délétères reconnaît Eiffage. Un témoignage que la député ne manque pas de retranscrire dans son courrier au préfet : « les dioxydes d’azote et de soufre sont des gaz irritants pouvant entraîner des altérations de la fonction respiratoire. Les composés organiques volatils ont des effets très divers selon les molécules : simple gêne olfactive ou respiratoire jusqu’à des effets cancérigènes pour le benzène par exemple. »
Dans sa plaidoirie, Catherine Grèze s’appuie également sur l’expertise de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), rendue publique le 11 septembre 2013, qui reconnait un risque sanitaire associé à une exposition des travailleurs au bitume. Mais, souligne la député, « nous n’avons pas d’études précises sur les rejets gazeux d’une centrale de ce type. Alors, la loi qui s’applique dans ce cas là est celle du principe de précaution. » Un principe reconnu dans la Charte d’environnement, intégrée dans la constitutionnalité du droit français.
Contactée, l’entreprise Eiffage n’a pas répondu à notre demande d’entretien.
Virginie Mailles Viard